Newsletter de la CFDT FTV #26 – mai 2024





Newsletter de la CFDT FTV #26


N°26 – Mai 2024

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CODE DU TRAVAIL : NO ZOB IN JOB ?

Nous nous étions penchés le mois dernier sur les plaisirs solitaires auxquels pourraient être tentés de s’adonner certains salariés dans leur véhicule professionnel, cette fois, plus romantique, nous abordons, l’amour au travail.
No zob in job, vous connaissez la (sage) maxime.
Mais que faire quand l’amour souffle dans l’open space ? À décorner les bœufs, encorner certains ou écorner la réputation d’autres ?

Bref,
– Un employeur peut-il prohiber les relations amoureuses entre salariés ?
– Un salarié peut-il entretenir une relation sentimentale avec son supérieur hiérarchique ?
– Comment distinguer sentiment et harcèlement ?

Cet article a été publié pour la première fois sur le blog de Mme Marylaure Méoloans, avocate. https://www.victoire-avocats.eu/lamour-au-travail-droit-devant-51/

Pot aux roses


Qui ne connait pas ou n’a pas vécu une telle situation à FTV ? Éros est partout, ses flèches aveugles, même dans l’audiovisuel. Selon un sondage du cabinet de recrutement PageGroup, nous sommes loin d’être les seuls.
• 26% des salariés ont envisagé d’avoir une relation au travail.
62% ont déjà franchi le pas
• et 38% déclarent qu’ils sont actuellement en couple avec une personne rencontrée au travail.

Voilà pour les faits. Qu’en est-il quand on parle de sentiments au travail ? Il n’y a nulle trace du terme « amour » dans le Code du travail. La vie sentimentale des salariés, leur intimité, est protégée par les textes, mais cette protection connaît des limites.

Par principe, l’employeur ne peut pas prendre en compte, dans l’exercice de son pouvoir hiérarchique, des éléments qui relèvent de la vie personnelle.
La vie sentimentale des salariés est en effet protégée. D’abord, l’article 9 du Code civil pose le principe que chacun a droit au respect de sa vie privée. Ensuite, l’article L. 1121-1 du Code du travail dispose que nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature des tâches à accomplir ni proportionnées au but recherché. Enfin, l’article L. 1132-1 du Code du travail prévoit une interdiction de discrimination en raison de ses mœurs, de son orientation sexuelle ou de sa situation de famille.
Donc, on a un cadre législatif qui pose une protection du salarié. En application de ces principes, la jurisprudence est venue dégager un certain nombre de solutions :
• Par exemple, l’employeur ne peut pas prohiber les relations amoureuses entre salariés, notamment par une clause du contrat de travail ou dans un règlement intérieur.
• La chambre sociale a également rappelé qu’un salarié qui entretient une relation avec un collègue ou un supérieur hiérarchique ne peut pas être licencié pour ce seul motif.
• Ou encore, une salariée ne peut pas être licenciée en raison de sa liaison avec l’un de ses supérieurs hiérarchiques sous le seul prétexte d’éviter un éventuel scandale. Ce motif n’est pas un motif valable de licenciement.

MAIS, comme souvent en droit, il existe des exceptions

Limites


Alors pourquoi ? L’union de deux personnes sur leur lieu de travail peut soulever un grand nombre de questions (favoritisme, représailles, intimidation, humiliation) pouvant mettre à mal l’exécution de ses obligations par l’employeur (risque de voir sa responsabilité engagée, risque de démission ou de licenciement, risque de détérioration de l’image de l’entreprise.).
À ce titre, la vie sentimentale des salariés va pouvoir être limitée. Tout d’abord, certains actes peuvent s’avérer inappropriés et faire l’objet de poursuites pénales ou de sanctions disciplinaires. Tel est le cas des agressions sexuelles ou encore des violences. Et dans ce contexte, on sait bien qu’en matière de harcèlement, l’employeur va évidemment devoir agir en cas de révélations ou de situations litigieuses. Il va devoir prendre des actions de prévention en amont d’un acte ou d’un agissement illicite. Il va devoir s’opposer à la survenance de comportement déviant.
Et cette obligation de prévention qui pèse sur l’employeur, elle va assurément bouleverser son rôle parce qu’il ne va pas pouvoir détourner le regard de ces interactions interpersonnelles dans l’entreprise. Il va devoir prendre une part active dans la recherche de la protection des salariés.
L’employeur ne peut pas concrètement se contenter de fermer les yeux sur des relations en les considérant comme strictement personnelles et non professionnelles. Il est question ici de sujet lié au harcèlement, mais sans aller jusqu’au harcèlement, il existe parfois des comportements inappropriés.

La jurisprudence considère ainsi :
• Qu’est justifié le licenciement d’un salarié ayant des fonctions de directions qui s’est rebellé de manière injustifiée contre les décisions de son employeur à l’égard de sa compagne
• Que constitue un trouble objectif justifiant un licenciement le comportement du salarié à l’égard de sa concubine, également salariée de l’entreprise, ayant entraîné son arrestation sur le lieu du travail, et que l’employeur pouvait craindre la survenance de nouveaux incidents.
• Dans un arrêt plus récent du 13 avril 2023, la chambre sociale de la Cour de cassation juge que la grève des salariés pour manifester leur désaccord avec la réintégration dans l’entreprise d’un salarié condamné pour agression sexuelle sur mineur justifie le licenciement de ce dernier.

Ensuite, en vertu des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, une mesure prise favorisant un salarié par rapport à un autre – par exemple une promotion ou un avantage professionnel – doit être justifiée par des éléments objectifs, vérifiables et pertinents.
Enfin, et surtout, le harcèlement sexuel est prohibé par le Code du travail (art. L. 1153-1 à L. 1153-6) et le Code pénal (art. L. 222-32 et 222-33).

Tout est une question de limite. La liberté et la vie privée des salariés qui sont protégés en principe ne sont toutefois pas absolues.

C’EST À QUELLE HEURE LE JOURNAL ?

Comme chaque mois, le canal à l’Orange expose un tract qui a marqué les esprits, emblématique de l’air du temps. Et puisqu’il est question de temps, en mai, ce sera plus précisément d’heure dont il s’agit. À vos montres et vos boussoles. Nos spectateurs sont perdus dans la 4ᵉ dimension. Et nous aussi.

À l’heure où les audiences montrent des signes de faiblesse, il est temps de se poser des questions.
Et peut-être que la première d’entre elles nous est soufflée par nos interlocuteurs qui, sur le terrain, tous les jours, demandent tout simplement : « C’est à quelle heure le journal ? ».

Les malheureux ne mesurent pas l’ampleur du sujet qu’ils viennent de soulever.
Réponse (s) : 19h25, 19h04, 12h14, 12h37… Les équipes de reportage répondent comme elles peuvent. La scène se termine en général par un post-it sur un bureau. Une audience soumise aux courants d’air, en somme.
À France télévisions, nous pouvions faire mieux pour consolider l’information régionale de proximité. Nous devons faire mieux.

À l’instar de l’ensemble des radios et télévisions en France et dans le monde, nous devons proposer un rendez-vous, midi et soir, fiable et clair.
Les contraintes, elles existent pour tous les médias audiovisuels, et tous parviennent quand même à un résultat mémorisable.
De plus, l’heure de l’info, c’est l’heure de l’info. Pas l’heure des titres info, suivis de colonnes de publicités et de programmes variés. Ça, c’est un lapin qu’on pose à notre public. Voire une tromperie sur la marchandise.
La confiance est un axe fort de la stratégie de l’entreprise. Elle s’instaure aussi en donnant rendez-vous au téléspectateur et en l’honorant.

Avec une cohérence entre ce qui est annoncé et ce qui est fait. Et une cohérence entre le rendez-vous du midi et du soir. C’est bien ce que nous pratiquions auparavant avec les 12h et 19h des éditions antérieures à Ici.

L’heure du journal, ce n’est pas une question de second plan, c’est une question de survie, dans un monde très concurrentiel, avec des chaînes d’information locales et d’autres médias, qui se développent pour faire de l’information régionale.

Le temps presse et le moment est venu de se pencher sur cette question afin de simplifier sa réponse et de retrouver notre audience à son meilleur niveau.

INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
L’EUROPE L’ENCADRE ET NOUS ?

IA et médias

Cela va faire un an que de nombreuses rédactions se sont dotées d’une charte encadrant l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) : le groupe Les Échos / Le Parisien, The Guardian, le Monde, Reuters, France Info, la BBC, le média Vox Europ, ou encore la radio canadienne CBC.

Signe des temps, le 13 mars dernier, Le Monde a signé un partenariat avec Open AI qui permettra à la société de s’appuyer sur le corpus du journal pour établir et fiabiliser les réponses de son outil ChatGPT, moyennant une source significative de revenus supplémentaires.
Le recours à l’IA n’est pas nouveau (en 2015, déjà, pour couvrir les élections départementales, Le Monde a utilisé un robot pour rédiger 36 000 articles) mais son essor exponentiel exige désormais de mieux encadrer les pratiques, fixer des bornes, former les salariés et d’être transparents avec les lecteurs/spectateurs/auditeurs. Anticiper, adapter nos organisations de travail, nos pratiques et nos outils face aux changements profonds qui sont de toute façon inévitables.

D’après Francesco Marconi, professeur de journalisme à l’Université Columbia de New York, et auteur de l’ouvrage “Newsmakers: Artificial Intelligence and the Future of Journalism”, il nous faut rapidement intégrer ces nouvelles technologies afin de penser un nouveau business model. Avant d’être débordés. En effet, grâce à l’IA et ses dérivés technologiques, les machines sont capables d’assurer entre 8 à 12% des tâches journalistiques.
Les applications de l’IA comprennent l’automatisation de tâches telles que la veille, la transcription d’interviews et vidéos, la rédaction de rapports financiers, l’analyse des contenus à grande échelle, la détection d’événements ou de fake news, ainsi que l’extraction automatique des métadonnées et l’archivage par sujet.

Aujourd’hui, les géants du journalisme ont intégré ces nouveaux outils.
La start-up parisienne Syllabs a levé fin 2017 deux millions d’euros pour développer son moteur de rédaction basé sur un algorithme qui collecte, trie et organise des données afin de les reformater en contenu rédactionnel ciblé. Syllabs déploie ses technologies dans des médias français tels que Les Échos ou chez nous à France TV (comptes rendus de matchs de Ligue 1, génération de résultats électoraux, comme la présidentielle).

À France Télévisions pourtant, nous ne sommes toujours pas dotés d’une charte IA. Lors de la dernière commission déontologie du 22 novembre 2023, elle était « en cours » de rédaction. Depuis silence TV.
Des formations sont déjà déployées pour l’encadrement journaliste à l’UFTV. Quand le seront-elles pour le reste du personnel ? À ce jour, seul un webinaire obligatoire, mais non planifié (et donc peu suivi) sur les nouvelles consignes d’anonymisation a été mis en place face aux capacités de « défloutage » de nos images par l’IA.
Pour le reste, la direction affirme « que Chat GPT ne fait pas nos articles. Ce n’est pas l’IA qui rédige nos textes parce que l’IA n’est pas une source donc c’est strictement interdit. » Argument peu convaincant et pour le coup assez artificiel.

IA Act, droit d’auteur et droit à l’information

Le 13 mars, le Parlement européen a adopté l’IA Act (523 pour, 46 contre, 49 abstentions). Historique, mais insuffisant nous concernant.
Ce Règlement vise notamment à encadrer le recours à l’IA sur le lieu de travail. Il s’agit, d’une part, de protéger les droits fondamentaux contre les risques liés à l’intelligence artificielle et, d’autre part, d’encourager le développement européen de l’IA. Pour cela, l’UE permettra à chaque État membre de mettre en place un espace où les entreprises pourront tester leur technologie sans avoir à respecter l’ensemble de la législation.
V. positionnement de la CFDT à ce sujet.

Concernant les médias plus spécifiquement, l’IA Act pose le principe d’obligations de transparence. Ces obligations incluent l’élaboration d’une documentation technique, le respect de la législation européenne sur les droits d’auteur, ainsi que la diffusion de résumés détaillés sur le contenu utilisé pour leur formation. La référence aux droits de propriété intellectuelle est actée permettant d’envisager un dispositif de licence, éviter le siphonnage sauvage de données et faire un pas vers la rémunération des auteurs.
Par ailleurs, tout système produisant du contenu, tel que ChatGPT ou Midjourney, doit informer l’utilisateur qu’il interagit avec une machine et spécifier que les contenus sont générés par une IA. Il doit être clairement énoncé que ces technologies ne doivent pas être utilisées pour altérer la réalité ou tromper l’utilisateur. Il est également requis que les entreprises responsables de la création de ces modèles assurent un contrôle sur leurs résultats.

Par contre, l’IA Act ne répond pas exactement à nos problématiques face à l’IA et notamment le droit à l’information. Reporter sans frontières propose quelques pistes de travail et de réflexion afin que les IA :
– respectent les standards journalistiques,
– donnent de solides garanties en matière de protection des sources journalistiques et de transparence des contenus
– respectent le pluralisme
– réfèrent à des standards de fiabilité. Les sources utilisées pour produire un contenu doivent par ailleurs être citées et les auteurs des données d’origine, rétribués…

Retrouvez les pages spéciales élections européennes sur le site de la CFDT et Syndicalisme Hebdo.

NOUVELLE-CALÉDONIE LA 1ʳᵉ : LES JOURNALISTES SONT DEVENUS DES CIBLES

Ce tract est paru le mardi 21 mai dernier. Il rend compte de la difficulté des salariés de Nouvelle-Calédonie la 1ʳᵉ d’exercer leur métier alors que l’île connait son 9e jour d’émeutes. La CFDT FTV demande des moyens supplémentaires afin d’assurer la sécurité et l’indépendance de ces derniers.

La Nouvelle Calédonie connaît ce mardi 21 mai, son 9ème jour d’émeutes et l’état d’urgence n’y change pas grand-chose. Les feux allumés sur les barrages, dans les centres-commerciaux et les entreprises, dans les cœurs, brûlent toujours. La menace est partout. Au coin de chaque rue. Au mitan de chaque route. Pour nos collègues journalistes de Nouvelle Calédonie la 1ère aussi, …

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Nouvelle Calédonie la 1ère : Les journalistes sont devenus des cibles

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