Madame la présidente, vous nous avez perdus !
Vous avez perdu les salariés, à force d’empiler les projets, tous périmètres confondus. Des projets qui tantôt se chevauchent, tantôt se suivent, à un rythme effréné. Qui, aussi, sont abandonnés, mais dont les dégâts et les cicatrices profondes restent et marquent durablement.
Nos parcours professionnels ne sont pas linéaires, nous l’avons compris depuis longtemps. Mais quand tout est remis en cause en même temps, quand rien n’est stable dans l’environnement professionnel, alors on démotive les salariés, pire, on les met en danger.
L’entreprise agile, le « work in progress » que vous avez vanté lors de vos 1ers CSE Centraux – nous nous en souvenons ! -, les lignes hiérarchiques plus plates, les process allégés… Tout cela aurait pu séduire. Mais rapidement, nous nous rendons compte que cette transformation de l’entreprise est douloureuse, et que les salariés sont les 1ers à en faire les frais.
Quand l’entreprise tente un Salto et se ramasse… On se souviendra surtout du coût qui reste porté par les salariés. A vouloir tout faire en même temps, on fait mal et ça nous coûte cher.
France Ô, disparue, remplacée par une plateforme que personne ne connait ; les salariés de Malakoff laissés en déshérence, sans projet – si ce n’est la vente du bâtiment de la rue Danton. Et les stations ultra-marines ? On y teste parfois des pratiques professionnelles peu orthodoxes, c’est la valse permanente des directions et encadrements, dans les rédactions une réorganisation chasse l’autre…
La régionalisation du réseau F3 ? On est loin du compte, et seul le projet Tempo/ICI à moyens constants et au prix de la disparition des éditions nationales de la 3 figure à l’agenda.
La Fabrique ? La Cfdt le dénonce depuis la restructuration de la filière production de la 3, l’objectif réel est bien de lui couper les jambes, pour qu’un jour, la production soit sous traitée totalement à FTV Studio et aux prestataires externes.
L’info nationale ? C’est France Info qui compte, pour vous, maintenant. Une info de flux, du direct, des « experts » à la chaine que personne ne connait, mais on est « en live », on est en boucle. Pendant ce temps, les éditions de 13H et de 20H de France 2 nous racontent les marchés de Provence et relayent la parole de quidam dans des micros-trottoirs… Et les éditions nationales de France 3 sont condamnées sans autres explications.
Vous avez perdu un peu tout le monde.
Nous sentons bien que nos encadrements, de plus en plus souvent, font le gros dos à l’annonce d’un projet. On y va, mais à reculons, on croise les doigts, peut être que cela ne se fera pas. Ou, si ça se fait, on trouvera bien comment contourner les consignes.
Parce que les moyens sont limités, parce qu’imposer à un salarié travailler dorénavant de 10H à 20H30 avec des temps de pause fantaisistes et variables, pour un résultat « antenne » pas meilleur que ce qui était diffusé auparavant… C’est compliqué.
Parce qu’expliquer à un salarié, qui a choisi de travailler pour France Télévisions, qui est en milieu voire en fin de carrière, qu’une fois de plus, il devra être « agile », mais qu’on ne peut pas lui dire pour quoi faire et comment il y arrivera, c’est difficile.
Parce que mettre en œuvre des projets techniques, éditoriaux, organisationnels, immobiliers, sans avoir une vision d’ensemble, c’est parfois acrobatique.
La Cfdt réclame une information juste et de bonne foi sur tous les projets de l’entreprise. Et cela suppose que la raison d’être des projets soit discutée et expliquée, que les liens entre tous les projets soient expliqués, et que les impacts des uns sur les autres soient mesurés. Alors « mettez sur pause », pour regagner la confiance des salariés qui sont la richesse de cette entreprise.