Pendant 4 semaines, le journal régional de France 3 Bretagne sera commun avec celui de France 3 Pays-de-la-Loire et France 3 Centre-Val-de-Loire.
Pendant 4 semaines, nous allons proposer aux téléspectateurs, un journal à 3 régions dans lequel il existe autant de cohérence éditoriale entre Le Conquet dans le Finistère et Saint-Amand-Montrond dans le Cher, distants de 713 kms, qu’entre Paris et Marseille. Auriez-vous imaginé une telle mutualisation entre ces deux antennes ?
Pendant 4 semaines, la locale d’Iroise restera confinée sur le Finistère, alors qu’elle aurait pu saisir l’occasion de sortir de sa confidentialité, en étant diffusée sur les quatre départements bretons. Ne pensez-vous pas qu’un un reportage sur Morlaix aurait été plus pertinent pour un habitant de Saint-Brieuc que le journal des régions qui lui est proposé ?
Pendant 4 semaines, la langue bretonne sera saupoudrée dans l’édition locale, à raison d’un reportage par jour, quand cela se peut… Rappelons que le monde culturel breton s’était vivement mobilisé lors du premier confinement, surpris de ne pas voir de breton à l’antenne !
Pendant 4 semaines, nous allons devoir renoncer à l’équivalent de 120 reportages en Bretagne.
Pendant 4 semaines, aucun sujet ne traitera des élections départementales et régionales. A cette date, elles semblent maintenues, mais pas les journalistes censés les couvrir.
Comment expliquer ce choix à ceux qui nous regardent ? Que dire aux concitoyens et aux représentants politiques bretons quand ils nous interrogeront sur l’abandon de nos missions de service public en pleine crise ? Car, dans les circonstances que vous nous imposez Mme Ernotte, nous devons renoncer à couvrir l’actualité et à informer notre public sur ce qui se passe sur son territoire, à un moment où le lien social manque cruellement.
Doit-on recommander à nos téléspectateurs de se tourner vers d’autres médias ? Vers nos concurrents locaux qui eux, seront bel et bien sur le terrain ?
Quand nous nous retirons de nos territoires, la démocratie est malmenée. Quelle logique, à l’heure où la direction de France Télévisions lance un nouveau projet intitulé « démocratie » ? L’ADN de France 3 c’est pourtant la proximité. Nous nous souvenons que suite à la crise des gilets jaunes, nos directions ont reconnu avoir été sourdes à la montée de ce mouvement populaire et ont décidé de renforcer notre présence.
Depuis, nos journaux bretons se sont enrichis de modules de 7 minutes à la rencontre des acteurs de notre territoire, puis de feuilletons sur des lieux ou des personnalités marquantes et enfin, tout récemment de 13 minutes diffusées à partir de 18h30. Treize minutes réalisées, sans moyen suffisant, sur le terrain, là encore pour traiter des thématiques qui intéressent les Bretons.
Tout ce travail est aujourd’hui nié. La démotivation et la colère gagnent les équipes. La direction générale fait encore une fois preuve de défiance à l’égard de ses régions, qui se sentent incomprises et méprisées.
Pourquoi ce choix ? La direction nous fait savoir qu’il s’agit de protéger les salariés. Où était ce mantra quand nous demandions à reporter le démarrage du 18h30 à septembre 2021, plutôt que de le lancer le 25 janvier dernier, quand les rues étaient désertées, les hôtels et commerces fermés et la vigilance rouge installée dans nos entreprises ?
Depuis le début de la crise l’antenne de Bretagne n’a jamais connu de cluster en son sein. Comme partout en France, nous avons eu notre lot de salariés contaminés par la COVID-19, mais jamais dans le cadre du travail. Les personnels ont acquis les gestes barrières : masques, distance de sécurité, nettoyage de mains, sens de circulation, plexis…
Nous nous interrogeons sur les raisons profondes de la direction quand nous savons que le premier confinement aurait permis l’économie de 6 millions d’euros.
Ces décisions prises sans concertation nous inquiètent. Nous savons comme il est facile de perdre des téléspectateurs, mais ô combien difficile de les reconquérir.
La saison 1 du confinement avait été une catastrophe éditoriale. Mais nous étions dans la stupeur. Le teaser de la saison 2 ne laisse rien entrevoir de bon. Et cette fois-ci nous n’aurons aucune excuse.
Mme Ernotte, rendez-nous nos JT bretons !