C’est un exercice que l’on n’avait encore jamais fait à FTV. Pourtant en termes d’expérimentations nous sommes plutôt calés.
L’audition sur trois demi-journées de tous les DR du réseau France 3 sur le 18H30, dans le cadre de la commission « économie et structure » de ce CSE. Un directeur par heure, tous à la queue leu leu et par écran interposé, en mode « Académie des 9« , mais à 12 directeurs régionaux.
Objectif : présenter au cas par cas les moyens mis en œuvre et les ajustements prévus sur le 18H30. Et les moyens, c’est tout l’enjeu de cette commission économie et structure élargie, car voyez-vous, les moyens c’est ce qui manque partout à nos 18H30.
Pendant ces trois jours, les mêmes mots : “éventuellement”, “produit plutôt satisfaisant”, “nouvelles écritures”, “souplesse”. Toujours les mêmes éléments de langage “autant que de besoin”, “expérimentation”, “innovation”, “proximité”.
Une mélopée lénifiante quand les émissions, elles, sont stupéfiantes.
A Strasbourg, des documentalistes qui font seules des modules archives ou un monteur qui fait son propre zapping sans journaliste, sans UCC.
A Orléans, un service Web ratiboisé de moitié pour fabriquer le 18H30. En AURA aussi. A PIDF ce n’est guère mieux. Le web, victime collatérale de ces émissions improvisées. Le web dont les audiences dans tout le réseau s’effondrent. Il faudra nous expliquer un jour la stratégie numérique de FTV qui ressemble fort ici à du sabordage. Du sabordage de notre propre avenir.
A Montpellier, deux journalistes qui filment uniquement avec des UTS, à tour de rôle pour la même séquence, rédacteur un coup, puis JRI l’instant d’après, et qui balancent dans la foulée les images en direct en faisant fi de la convention collective et des préconisations de la CSSCT.
Souvent des micros-trottoirs, souvent des scriptes au bord de l’implosion, des journalistes dégoûtés et qui jettent l’éponge.
Souvent, des ITW Skype avec en bonus un tuto, distribué aux intervenants pour “cadrer” l’exercice, qu’ils pratiquent de chez eux.
Partout du bricolage à la petite semaine et un grand vide éditorial.
Très peu de directeurs nous diront leur détresse. Evidemment, devant la direction du réseau, on se tait.
Seuls les néophytes osent avouer que “Là, on ne peut pas, on va demander à l’INA de nous fournir un module archives clé en main, si c’est possible, si ce n’est pas trop cher …”. Pauvre Centre Val de Loire.
Les autres, plus aguerris à l’euphémisme et à la langue de bois, ne voient aucun problème. Nulle part. Ou si peu.
Et quand nous leur parlons moyens, défiant toute évidence, il n’y a plus de souci : “On s’arrange”. Comme par magie, les fiches d’impacts pourtant demandées à corps et à cri depuis deux mois ont disparu. Mieux, elles “n’ont jamais existé”.
Là où ça coince encore, allez, on l’avoue quand même un peu, il y aura des solutions. Eventuellement – mais surtout, ne soyez pas pressés.
Les postes vacants ? “Ils sont en attente, car nous priorisons la mobilité, l’évolution des métiers”.
Les renforts CDD ? “ Oui, mais en restant dans l’enveloppe CDD annuelle”. Des postes supplémentaires ? “Ça va prendre du temps, on va faire des transferts d’ETP, dégager des moyens”… Ou ben tiens, “on va expérimenter.”
A quoi bon ce défilé de têtes bien pensantes ? On a compris, au bout de deux heures à peine.
La régionalisation, telle que la préfigure ce 18H30, sera synonyme de paupérisation toilettée.
Paupérisation de nos métiers, de nos contenus, et du dialogue social. Dans ce grand oral puissance 12, on ne nous entend pas, et on ne s’entend pas. D’ailleurs, on ne voit sûrement pas la même chose.
Parce que ce qui nous saute aux yeux, à nous, durant ces trois jours en mode « académie des 12 », c’est la lente, l’inexorable descente du réseau France 3 vers le grand n’importe quoi.
C’est triste à pleurer. Au moins à l’Académie des 9, ils avaient l’air de bien se marrer.
Oui, la télé aussi, c’était mieux avant.