En ce mois de décembre, deux mots, pour les uns chuchotés, pour les autres plus affirmés, semblent capter l’attention de l’ensemble des salariés de France Télévisions: « La prime », et la phrase qui en découle : « tu l’as eue la prime, toi ? ».
Ça tombe bien, décembre, c’est le mois des cadeaux, et la direction distribue des sous. Mais pas à tous. Dans l’opacité la plus totale.
Il parait que le père Noël est une ordure, nous ne sommes pas les premiers à le dire.
Donc, pour Noel cette année, il y a « LA » prime. Une prime très vite été appelée « prime covid », parce qu’imaginée au moment du premier confinement. Et qui fait grincer des dents un peu partout ; que ce soit à Mayotte, en Occitanie, à Paris, à Boulogne-sur-Mer ou à Malakoff, on sait que « la prime » existe, sans en connaitre les bénéficiaires, le montant, les critères d’attribution.
C’est la direction qui a voulu ce dispositif et qui l’a proposé aux organisations syndicales lors de la négociation annuelle obligatoire (NAO) en juin 2020. Mais, n’ayant pas réussi à convaincre les OS à signer la NAO, la direction met en œuvre l’attribution de cette prime unilatéralement.
Une prime qui pèse lourd dans l’enveloppe « augmentations salariales » : lors de la négociation NAO 2020, la direction souhaitait réserver plus de 3 millions d’euros aux primes exceptionnelles, 3 millions en partie ponctionnés sur l’enveloppe dédiée aux mesures individuelles…
Une prime expliquée, dans un site, ainsi : « Le COVID ayant considérablement modifié le fonctionnement de certains services en cette année 2020, cette prime exceptionnelle peut être ainsi rebaptisée prime covid »… et ailleurs, ainsi : « Toutefois, certaines primes sont aussi accordées à des collaborateurs pour un investissement exceptionnel en 2020 antérieur – ou moins directement lié – au Coronavirus. ».
Ou encore : « les salariés qui ont travaillé tous les jours pendant le premier confinement se sont vu attribuer cette prime ». Et dans tel site, si vous avez été un « facilitateur » ( ?) dans un collectif, il se peut que vous ayez été remercié par une prime.
C’est flou flou flou, on n’y voit plus rien, on n’y comprend que dalle.
La CFDT a toujours privilégié les augmentations salariales collectives aux mesures individuelles arbitraires. Les primes sont, à France Télévisions, ce qui se fait de pire en la matière : une enveloppe à la disposition discrétionnaire des chefs de service, qui les distribuent, tels les fonds secrets de la République… « À la tête du client », les primes divisent et démotivent, suscitent des sentiments d’injustice et de l’inquiétude.
En année « normale », ce sont plus d’1 million d’euros qui sont distribués sous la forme de primes ; sans compter la part variable des managers, qui est une prime sur objectif, alors que les objectifs ne sont pas affichés, ne sont pas connus des salariés dont le travail permet au manager de réaliser ses objectifs.
Mais revenons à la « prime COVID » : qui ne la mérite pas ?
Les administratives ont calculé les payes, ont sorti les plannings, payé les factures, assuré la communication de FTV (…) ; les programmes ont été chamboulés et les équipes programme ont bossé. Les techniciens ont assuré diffusions quotidiennes et fabrication de nos programmes et JT dans des conditions dégradées et en gérant les contraintes liées à la crise sanitaire, les journalistes ont tourné ou écrit pour le web…
Tout le monde a contribué aux efforts, sur site ou en télétravail, et ceux qui ont été écartés de l’activité, sur décision de l’entreprise, et parce que le mode dégradé était imposé, ont souffert de leur inactivité contrainte.
Alors, les uns sont-ils plus méritants que d’autres ? Et qui en décide ?
Diviser, valoriser les uns et faire comprendre aux autres qu’ils ne sont pas nécessaires à la bonne marche de l’entreprise, embrouiller, démotiver: une stratégie qui n’est jamais payante.